Le texte de Hegel peut être rapproché de celui de Montaigne ci-après. Il est intéressant de remarquer que contrairement à Hegel qui conclut à l’importance primordiale de la parole, voire du mot, Montaigne, quant à lui, ne manque pas d’ajouter: «soit en Bergamasque, soit par mines, s’il est muet» :

 

J'en oy qui s'excusent de ne se pouvoir exprimer, et font contenance d'avoir la teste pleine de plusieurs belles choses, mais, à faute d'eloquence, ne les pouvoir mettre en evidence. Cest une baye. Sçavez-vous, à mon advis, que c'est que cela? Ce sont des ombrages qui leur viennent de quelques conceptions informes, qu'ils ne peuvent desmeler et esclarcir au dedans, ny par consequant produire au dehors: ils ne s'entendent pas encore eux mesmes. Et voyez les un peu begayer sur le point de l'enfanter, vous jugez que le travail n'est point à l'accouchement, mais à la conception, et qu'ils ne font que lecher cette matiere imparfaicte. De ma part, je tiens que, qui a en l'esprit une vive imagination et claire, il la produira, soit en Bergamasque, soit par mines s'il est muet:[...]

MONTAIGNE – Essais - Livre premier, chapitre XXVI, p. 216-217